Des détournements de sens, au détriment de la santé des enfants
Texte publié dans le Journal de Montréal, le 6 mai 2021
La Société canadienne de pédiatrie (SCP) se contente-t-elle de relayer l’information d’organismes qui s’inscrivent dans la mouvance transaffirmative, comme Jeunes identités créatives? Ne devrait-elle pas plutôt encourager une médecine basée sur les faits, comme la Society for Evidence Based Gender medicine (SEGME)?
Le 8 mars dernier, notre groupe faisant parvenir à la SCP une lettre dénonçant le vocabulaire idéologique et peu scientifique de leur page web « L’identité de genre ». Après s’être excusés par courriel [1] de la mauvaise traduction de leur page et l’avoir changée en supprimant les termes les plus idéologiquement orientés, voilà que la page a été de nouveau changée et que les détournements de sens laissant sous-entendre que le sexe serait « assigné » à la naissance, sont de retour. Cette formule, d’apparence neutre, sert d’assise à la théorie de l’identité de genre, qui ne relève pas de la médecine, et dont les conséquences sont loin d’être anodines.
Nous ne pouvons croire qu’un médecin considère qu’il assigne un sexe au bébé, pas plus qu’il ne lui assigne un poids ou une taille. Il s’agit, dans tous les cas, de constater un certain nombre de faits sur une base objective, dans le cas du sexe, sur la base des organes sexuels du nouveau-né. Nous leur avons donc écrit pour demander les raisons de ce revirement, et nous leur avons proposé une rencontre de vive voix, ce qu’ils ont poliment refusé.
Le nœud du problème
La terminologie n’est pas un problème en soi, mais elle est révélatrice d’une idéologie et de l’approche privilégiée par la SCP et par les organismes qui la conseillent pour traiter les enfants qui s’identifient au sexe qui n’est pas le leur. Le nœud du problème c’est qu’avec cette terminologie, il est possible de penser que la SCP privilégie la médecine transaffirmative, décrite par de plus en plus de médecins à travers le monde comme étant une médecine expérimentale pratiquée sur de jeunes personnes vulnérables (un article de la revue médicale Medscape, dont nous citons des extraits plus bas, est très révélateur à ce sujet). C’est un motif d’inquiétude bien légitime!
Les jeunes qui s’engagent dans cette avenue se voient prescrire des bloqueurs de puberté et poursuivent, dans presque tous les cas, par un traitement aux hormones du sexe opposé, dont les conséquences à long terme peuvent être graves (infertilité, ostéoporose, maladies cardiovasculaires, etc). Dr Malone, professeur d’endocrinologie et l’un des cent médecins de la SEGME explique « Si vous commencez les bloqueurs de puberté au stade 2 de Tanner (puberté précoce, comme recommandé), et que vous mettez ensuite ces enfants directement sous hormones intersexes, il est presque certain qu’ils seront infertiles, ainsi que de nombreux autres changements irréversibles. »
Une décision judiciaire rendue à Londres en décembre 2020 conclut d’ailleurs que les mineurs de moins de 16 ans ne peuvent consentir à un tel traitement aux conséquences potentiellement graves, et dont certaines implications sont mal connues des médecins eux-mêmes.
Pour justifier l’approche transaffirmative dès le plus jeune âge, les risques de suicide sont souvent évoqués. Or, il n’existe aucune étude probante permettant de conclure à l’amélioration de la santé mentale à la suite d’une telle médicalisation, et des études récentes tendent même à prouver le contraire. À ce sujet, Dr. Danuta Wasserman, professeure de psychiatrie à Stockholm et experte mondiale en matière de suicide, rappelle l’évidence: « On conseille toujours aux gens d’éviter de prendre des décisions qui changent leur vie lorsqu’ils sont déprimés, anxieux ou en deuil. Nous savons que de nombreuses personnes transgenres souffrent d’anxiété et de dépression profonde. De quelle aide ont-elles besoin? Les preuves montrent clairement, dans la prévention du suicide, que nous avons besoin d’une thérapie conversationnelle pour les jeunes avant, pendant et après la puberté. »
Une position insoutenable
La médecine transaffirmative pave le terrain pour faire des jeunes souffrant de dysphorie du genre des patients à vie. Pourtant, à l’époque où l’approche exploratoire neutre —dite d’attente vigilante— était le standard, entre 60 et 90% des enfants se réconciliaient avec leur sexe à l’âge adulte, et une grande partie d’entre eux se révélaient être gays. Autrement dit, la SCP semble privilégier une approche « one-size-fits-all » qui, en pratique, serait la voie à suivre pour environ 20% de ces enfants. De plus, cette médecine s’appuie sur des données que les organismes indépendants qualifient de « pauvres ». Pour cette raison, des pays comme la Finlande privilégient maintenant l’approche psychologique pour traiter la dysphorie du genre chez les mineurs, et la Suède vient de mettre fin à l’utilisation des bloqueurs de puberté pour les moins de 16 ans.
Pour résumer, à la lumière des données et des études disponibles, rien ne justifie l’adoption unilatérale de la médecine transaffirmative pour les mineurs, d’autant plus que le débat demeure intense au sein de la communauté médicale elle-même. Pourquoi alors la SCP endosse-t-elle publiquement une position idéologique plutôt que de présenter honnêtement l’état de la connaissance, les risques pour la santé et les nombreuses inconnues?
Que la SCP ne veuille pas poursuivre le dialogue avec nous, là n’est pas le problème. Ce qui l’est par contre, c’est qu’elle se cache derrière de la pseudo-science et une terminologie fallacieuse. À l’instar de pays européens, il serait temps qu’ici au Québec les médecins acceptent d’ouvrir le débat sur les meilleures pratiques en matière de transidentité. Le tabou a assez duré. Il en va de la santé mentale et du bien-être des enfants.
Pour les droits des enfants du Québec,
Collectif de parents d’enfants inscrits dans le système scolaire québécois.
Philippe Blackburn, Cochise Brunet-Trait, Dominique Caron, Martin Côté, Shirley Christensen Côté, François Dugré, Philippe Dujardin, Nadia El-Mabrouk, Milène Girard, Jean-François Guay, Johanne Harvey, Christine Lauzon, Denis LeBlanc, Isabelle Legault, Yann Ménard, Guillaume Paradis, Olivia Pelka, Ginette Pelletier, Bertrand Plante, Sylvain Plourde, Christian Sabourin, Stéphane Tremblay, Clémence Trilling, Johanne Villeneuve
[1] Voir également la réponse publique de la SCP : https://www.journaldemontreal.com/2021/03/10/un-soutien-inconditionnel-aux-enfants